« L’invasion médicale ne connait pas de bornes. Une sexocratie de médecins, avec le concours de militants, de formateurs et de laboratoires, laïcise et scolarise la sexualité et, en orthopédant la conscience corporelle, reproduit l’ « homme assisté » jusque dans ce domaine intime ».
I. Illich, Némésis médicale, 1975.
Deux livres, sortis à peu de temps d’intervalle, abordent la question de la dystrophie de genre chez les enfants – c’est-à-dire le sentiment d’une inadéquation entre leur sexe de naissance et leur « ressenti ».
Il s’agit de l’ouvrage de Caroline Eliacheff et Cécile Masson, La fabrique de l’enfant-transgenre, paru chez l’Observatoire, et de celui de Charles Melman et Jean-Pierre Lebrun, La dysphorie de genre. A quoi se tenir pour ne pas glisser ?, chez Erès ; ce dernier étant présenté comme une suite, 20 après, de leur célèbre livre, L’homme sans gravité.
Ces deux ouvrages partent d’une critique d’un film « documentaire » intitulé Petite fille, diffusé sur Arte en décembre 2020. Ce dernier met en scène l’histoire du petit Sasha, âgé de 8 ans, qui, se sentant être fille, est accompagné vers sa transition de sexe par des adultes – parents et médecins – tout acquis à ce projet.
La première chose qui étonne les auteurs est que les questionnements de la mère, déclarant à plusieurs reprises qu’elle a toujours souhaité avoir une fille, sont ignorés par la psychiatre de l’hôpital. Ce dernier oriente de facto la famille vers les services spécialisés. Il est aussi notable que l’enfant ne soit jamais écouté sans sa mère, et que ni l’un ni l’autre n’a vu de psychologue avant la visite au centre médical et le rendez-vous avec l’endocrinologue.
Complaisance des médias
Un tel constat devrait susciter l’inquiétude du téléspectateur. Comment est-il possible qu’un questionnement si habituel d’un enfant de cet âge quant à son identité puisse conduire en première instance à se tourner vers de tels spécialistes ? Se pourrait-il que l’existence d’une consultation et d’une filière dédiée détermine par avance l’issue de cette affaire ? Et comment en arrive-t-on à imaginer qu’un enfant de 8 ans puisse comprendre en quoi consiste la transition médicale et la réassignation sexuelle – c’est à dire la prise d’hormones féminines à vie et, entre autre, l’ablation de testicules dont l’usage sexuel lui est pourtant encore inconnu ?
Il serait aussi entendu qu’un enfant de 3 ans, âge à partir duquel il est dit que Sacha percevait une préférence pour le genre féminin, puisse avoir des désirs strictement indépendants de ceux des adultes en qui il place sa confiance… Nous savons pourtant de longue date qu’un enfant est dans une relation de suggestion à l’égard des adultes – ce pourquoi, par exemple, il ne peut y avoir de consentement d’un enfant de 15 ans dans le cas de pratiques sexuelles avec un adulte. Ce principe a été entériné par la loi du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l’inceste. Ce documentaire aura pourtant donné lieu à des commentaires et avis enthousiastes de la part de quelques médias d’opinion dont le militantisme aveugle témoigne d’une étonnante faculté à compartimenter les choses.
La manière dont est instrumentalisée la souffrance d’un enfant, et vraisemblablement celle d’une mère placée dans une situation de toute puissance, au profit de l’idée selon laquelle la castration de l’enfant peut caractériser une certaine idée du progrès est pour le moins inquiétante. D’autant plus que la croissance exponentielle des cas de dysphories de genre devrait alerter ces médias sur le caractère socialement construit de ces « souffrances » sans nul doute évitables.
Faillite des institutions
Tout aussi inquiétant est le fait que des institutions telles que l’école sont alors sommées de se conformer au pseudo désir de l’enfant, et contraintes de le considérer non pas comme ce qu’il est mais comme ce qu’il est censé vouloir être (au mépris par ailleurs de la loi qui impose lors des épreuves scolaires et les diplômes de se référer à la réalité de l’état civil). En France, la circulaire MENJS – DGESCO du 29 septembre2021 intitulée « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire » ouvre une première brèche. Et comme pour nous avertir de ce qui pourrait nous attendre, Caroline Eliacheff et Céline Masson citent l’inquiétant exemple du gouvernement Écossais : depuis le 12 août de nouvelles directives autorisent ainsi des enfants de 4 ans à changer de nom et de prénom à l’école, de manière informelle, sans le consentement de leurs parents. Ce début de « transition sociale », soutenue par l’institution scolaire, est le marchepied vers la dépendance à vie, l’abandon de tout projet procréatif, et une invitation supplémentaire à la déresponsabilisation des parents.
Sans doute est-ce là le témoignage d’une transformation du rôle des institutions. Leur force est ainsi mise au service de la réalisation des désirs individuels, alors même qu’elles avaient comme mission d’inscrire l’individu dans un cadre collectif qui le dépasse, fusse au prix d’une frustration parfois difficilement supportable. Pourquoi satisfaire ce désir si particulier ? Le nombre de personnes concernées ne peut pas en être la raison ; sinon il faudrait aussi satisfaire le désir incestueux, car le fantasme de coucher avec sa mère est partagé par un bien plus grand nombre de petits Sacha que le fait de vouloir changer de sexe.
Extension du marché du désir
La raison est donc ailleurs. Charles Melman et Jean-Pierre Lebrun nous invitent à regarder du côté du père, dont le mutisme dans le documentaire est symptomatique d’un bouleversement plus général, déjà mis en exergue dans l’homme sans gravité, et qui n’a fait que croitre : l’obsolescence de la fonction paternelle, assimilée au patriarcat. Cette dernière est la condition nécessaire de l’extension du domaine de la marchandisation et de l’affirmation d’un capitalisme nouveau dont la transformation des désirs en besoins est le moteur.
Pendant que les mères déroulent les éléments de langage d’associations LGBT qui captent la responsabilité due par un parent à l’égard d’un enfant au profit d’une cause qui n’a rien à voir avec le respect des plus petits et de leur souffrance éventuelle, s’affirment ainsi des intérêts industriels et financiers énormes. L’idéologie « trans » peut compter sur le relais de nombreux médecins et « psy », mais aussi de certains hommes politiques, parfois largement soutenus par l’industrie pharmaceutique. C’est notamment le cas du parti libéral au Royaume-Uni, promoteur d’un programme pro-trans, financé par Ferring Pharmaceuticals, qui fournit les bloqueurs de puberté. Les auteurs de La fabrique… évoquent selon leurs sources un financement de 1,4 million de livres sterling ; rappelant en outre, et à titre d’exemple, qu’un approvisionnement de 3 mois en bloqueur de puberté Lupron-PED coûte 9562 dollars (7800 livres sterling).
Négation de l’homosexualité ?
Il serait intéressant d’enquêter afin de savoir si de tels acteurs n’ont pas soutenu la récente proposition de loi n°4021 interdisant les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité d’une personne, adoptée à l’AN le 5 octobre 2021. Rappelons qu’elle opère une confusion manifeste, et sans doute volontaire, entre les thérapies de conversion et les démarches de prudence qui permettent de mesurer l’intention réelle des plus jeunes. Serait-il répréhensible de retarder leur médicalisation en travaillant sur leurs légitimes interrogations ? Aurions-nous oublié que l’adolescent est, par définition, un être en transition ?
La dysphorie de genre est un phénomène qu’il convient de distinguer de l’homosexualité. Quand la première remplace le sexe par le genre, la seconde se contente décaler la sexualité et le désir sur un objet non hétérosexuel, comme l’expliquent C. Melman et JP. Lebrun. N’y aurait-il pas dans bien des cas confusion entre les deux ? Le traitement contre la dysphorie de genre serait alors la première des atteintes à la liberté de vivre son homosexualité ; une sorte de miroir de l’hétéro-normativité qui obligerait à une harmonie entre le comportement / sentiment, et l’apparence biologique !
Retenons simplement cette hypothèse, et regardons plus avant ce à quoi engage, pour l’enfant, la réponse médicamenteuse et chirurgicale sensée répondre à ses souffrances. C. Elacheff et C. Masson en font une synthèse que nous complétons ci-après.
Corps martyrisé
Il est important de souligner en premier lieu que les effets de la testostérone administrée aux filles souhaitant devenir homme n’ont jamais été étudiés sur la femme… Il s’agit donc d’une forme d’expérimentation sur le corps des femmes, mais qui ne suscite guère d’émoi.
Nous savons, en parallèle, que le risque d’AVC est 9,9 fois plus élevé chez les femmes transgenres que dans le groupe témoin, nous relève une étude de 2018 citée par les auteures, et la possibilité de procréer est en outre gravement compromise.
Les œstrogènes pris par les garçons sont pour leur part contre-indiqués dans un très grand nombre de cas, et ils accroissent le risque d’accidents thromboemboliques veineux, de calculs biliaires, etc.
Pour les profiteurs de la dysphorie de genre, peu importe en outre de constater que les jeunes ainsi embrigadés sont plus souvent touchés que la moyenne par des troubles et/ou des évènements douloureux (hospitalisation, anxiété, décès d’un proche…) ; ni même que les suicides sont plus fréquents que la moyenne dans la population des personnes « trans » adultes… Les recours aux hormones, puis au bistouri, sont ainsi employés dans le déni des réalités psychiques, alors même qu’il est établi que 60 à 90 % des enfants surmontent cette discordance entre le sexe et leurs ressentis une fois adulte.
Rappelons aussi qu’en France la loi autorise déjà l’ablation des seins dès 16 ans ; et nul ne doute que les revendications pour permettre le recours aux autres opérations sauront se faire entendre par nombre de médias et parlementaires habitués des grandes luttes sociétales. Et de quels types d’opérations parle-t-on ? Y-a-t-il des mots pour expliquer aux enfants ce à quoi nous les invitons à l’âge adulte – ce que signifie la réassignation ?
Dans le cas du petit Sasha, le projet mené logiquement à terme, c’est une vaginoplasie. Concrètement, on coupe le gland du pénis dont une partie servira à la fabrication du clitoris. La paroi du vagin sera réalisée à partir de ce qu’il reste du pénis, une fois retiré les corps caverneux, et le scrotum permettra de créer les petites et grande lèvres.
La transformation du vagin en pénis s’appelle phalloplasie. L’opération est plus complexe et les résultats moins concluants. On prélève des tissus de l’avant-bras pour pré-fabriquer le pénis ; l’urètre est formé en roulant la peau vers l’intérieur, et on roule la peau vers l’extérieur pour former la peau du pénis. On introduit ensuite un cathéter pour greffer le pénis dans la région pubienne, puis on suture le vagin. Les petites lèvres font le lien entre l’urètre artificiel et l’existant. Les grandes lèvres sont utilisées pour former le scrotum, au sein duquel on place des prothèses pour former les testicules.
On se demande bien comment un adulte peut s’imaginer orienter un enfant, qu’il soit ou non le sien, vers une telle issue logique. Nous imaginons mal que l’enfant lui-même puisse se représenter la chose, et se projeter à l’âge adulte. Et tout ça pourquoi ? Les opérations permettent certes de changer l’apparence des organes sexuels mais que le génome ne change pas… Nous restons ainsi ce que nous sommes à la naissance, quel que soit l’artifice.
Mais silence ! Le sacrifice des enfants sur l’autel du progressisme et des intérêts de quelques « médecins » et industriels est ainsi consommé, et l’appétit des convives est vorace – sans limites, comme la liberté à laquelle ils aspirent, ou tout du moins l’idée qu’ils s’en donnent.
Liberté de qui ? Liberté pourquoi ?
Militants…
Ah, qu’elle est belle cette liberté lorsqu’elle est invoquée par l’adulte pour justifier ses propres abus à l’encontre des enfants ! Les années 1970 et 1980 ont ainsi vu se consolider des discours revendiquant la liberté de jouir du corps des enfants au motif de le libérer. Nous pensions la cause entendue. Un enfant n’est pas en mesure de consentir à de tels actes et la pédophilie, un temps perçue comme l’avant-garde du combat progressiste par analogie avec la défense de la cause homosexuelle, est devenue jusqu’à l’expression d’un mal absolu.
« Mon corps c’est mon corps », « ce n’est pas le tien », proclame un célèbre programme de prévention des violences sexuelles à l’attention des mineurs. Fort bien. Mais aurait-on oublié un autre refrain ? « Mon corps me sert à faire ce qui me plaît. Ne le force en rien et ne le brusque jamais ». Soit, mais qu’en est-il lorsque c’est l’enfant qui souhaite le brusquer, au motif, précisément qu’il doit lui servir à faire ce qui lui plaît ?
Dans le cas de la dysphorie de genre, bien des adules sont enclins à y lire l’expression d’une légitime revendication à l’autodétermination ; quelque chose à quoi nous devrions répondre avec compassion. C’est à ce stade que la cause des uns se mêle à celle des enfants dans le rejet commun d’un destin que nous imposerait l’assignation à une réalité biologique bien contraignante. Et c’est ainsi que se développe une reconfiguration de la perversité de certains adultes, toujours prompts à instrumentaliser les faiblesses de l’enfant, captant ses doutes et questionnements au profit de leurs certitudes, le plus souvent avec la complicité – coupable ou non – de parents préférant médicaliser plutôt qu’éduquer.
…et profiteurs
L’invention de la dysphorie de genre et les réponses qui lui sont apportées sont les derniers avatars de la colonisation de la vie par un pouvoir techno-médical qui s’engouffre comme à l’accoutumée dans les brèches ouvertes par les revendications sociales émergeantes ; quand il ne les suscite pas lui-même. Dans le cas présent, c’est le cœur sur la main qu’il prescrit et expérimente des traitements hormonaux sur des enfants de plus en plus jeunes, avec la « promesse » d’un recours prochain à des actes chirurgicaux radicaux qui s’apparentent à de véritables mutilations – mais avec la caution « morale » d’une idéologie transgenre à l’avant-garde de celle de la déconstruction dont elle est la concrétisation charnelle.
C’est ainsi que se développe un étonnant marché dont le corps et le sexe biologique de l’enfant est l’objet ; un marché rendu possible par la conversion des esprits à l’idée même de la consommation de soi – elle-même contrepartie d’une aspiration à la jouissance qui permet de maintenir à plein régime le rythme de la machine de production, condamnée à sans cesse inventer de nouveaux besoins.
Mais s’en tenir à ce niveau d’explication reviendrait à évacuer le rôle des consommateurs ; et il n’y a d’enfants consommateurs que dans l’ombre de parents qui ne le sont pas moins. Quel est donc leur rôle dans ce jeu de massacre ?
Je pense qu’il faut distinguer au moins deux situations parentales : le parent victime d’une part, et le parent complice d’autre part, figure pour laquelle nous pouvons identifier au moins deux facettes.
Le parent victime :
Ce qui est marquant dans le livre d’Eliacheff et Masson, c’est l’importance accordée aux réseaux sociaux. Les auteurs reproduisent de nombreux verbatim de parents, ainsi que les résultats d’études de référence, démontrant l’influence de ces derniers et l’activisme exercé par la communauté trans. Le plus souvent, ce sont de jeunes influenceurs dans des trajectoires de transition qui, cherchant vraisemblablement une communauté de substitution, se montrent les plus investis dans la promotion de cette nouvelle « identité-marchandise » créée par les réseaux « sociaux ».
Un des aspects les plus convaincant et inquiétant du livre est le parallèle fait entre le discours de ces militants et les procédés utilisés par les mouvements sectaires. Nous y retrouvons tous les procédés habituels :
- le processus consistant à faire naitre chez la personne un sentiment d’élection et l’appartenance à une communauté,
- les techniques de recrutement en ligne,
- le jargon pseudo-scientifique utilisé et la demande qui est faite aux nouveaux adeptes de croire à des faits qui n’ont aucun fondement scientifique,
- la référence à un discours empruntant à la rhétorique de la libération et de l’autoréférence,
- les blessures infligées au corps comme signe d’allégeance au groupe,
- les démarches intéressées financièrement,
- les pressions exercées sur les proches et la volonté de couper les relations entre le nouvel adepte des personnes avec lesquelles il entretenait un lien affectif.
Dans bien des situations, les parents sont désarçonnés par les revendications et les attitudes d’enfants sous emprise. La suggestion de ne pas être dans le bon corps est ainsi généralement orchestrée contre l’intérêt de l’enfant et dans une logique de substitution parentale. Mais tel n’est pas toujours le cas.
Le parent complice :
Parfois, les parents, comme dans le cas de la mère du petit Sasha, jouent un rôle actif dans l’élaboration et la conduite du projet de transition. Ne doutons pas même de la fierté de certains d’entre eux à avoir un enfant « différent », dont l’existence sera brandie comme un étendard aux couleurs d’une parentalité d’avant-garde. Pour autant, la majorité des parents « complices » ont sans doute une ambition plus mesurée, et s’inscrivent davantage dans un suivisme caractéristique de notre époque. Mais il y a aussi peut-être une autre façon d’être complice de cette nouvelle menace qui pèse sur les enfants : Et si la véritable transition à laquelle nous invitait à penser la dysphorie de genre n’était pas celle d’un sexe à l’autre, mais celle de l’enfant à l’animal de compagnie ? Explorons cette hypothèse…
Dans Jeux, modes et masses, Paul Yonnet, s’interrogeant sur l’importance accordée par nos semblables aux animaux domestiques invalidait les trois explications les plus communément admises : celle évoquant la raison économique, l’une relevant de la communication sociale, et la dernière issue de la psychologie personnelle (p. 212). Il leur préférait, en premier lieu, l’idée selon laquelle l’adulte recherchait une allégeance archaïque, caractéristique de la relation entre le plus jeune enfant et son parent. L’animal familier serait ainsi tel l’enfant qu’on voudrait garder enfant : « obéissant, privatisés autour d’exclusives relations, admiratifs, réglé, sans surprise, dépendants mais sachant remercier le maître » – tout ce qui fût perdu à une époque où se constitue un peuple adolescent autour de la consommation de produits nouveaux et de la création d’une sous-culture. Le rock’n roll et l’animal familier trouveront leur place au sein des foyers français de tous milieux durant la même période.
A l’émancipation sexuelle et à la mobilité des enfants a ainsi répondu le contrôle de la sexualité des animaux – « le rapport éducatif à l’animal présente une image exactement inverse, en miroir, du rapport éducatif à l’enfant », explique ainsi Paul Yonnet (p. 220). La transition de genre, dictée par la volonté de puissance des parents ou accompagnée par ces derniers, pourrait ainsi témoigner d’une nouvelle recomposition du rapport à l’enfant, où après avoir recherché dans l’animal ce qui fuyait chez l’enfant, le parent vient chercher chez l’enfant ce qu’il avait trouvé chez l’animal mais sans pouvoir pleinement jouir de la relation attendue, cette dernière étant forcément plus limitée que celle envisageable avec le fruit de ses entrailles. En ce sens, la dysphorie de genre serait moins le symptôme d’une souffrance de l’enfant que celui d’un trouble dans la parentalité, d’une volonté de puissance qui peut s’exprimer jusque dans la réassignation du sexe afin de rendre l’enfant conforme à son désir.
Le désir de la mère du petit Sacha n’était-il pas d’avoir une fille ? Le médecin transforme ce désir en besoin qu’il bien entend satisfaire, avec la caution morale du militant inclusif.
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S’il est vrai que la promotion de la dysphorie de genre et les réponses qui lui sont apportées participent d’un mouvement pour l’acceptation de tous, alors il faut saluer le miracle de la société inclusive qui nous fait renouer avec nos pulsions les plus archaïques ! Celles que la civilisation pensait avoir domptées et qui ressurgissent à la faveur de possibilités techniques et scientifiques nouvelles. Nul étonnement à cet apparent paradoxe, puisque la « trans »-gression des limites est l’ambition même de ces dernières.
Plus largement, parce que la dysphorie de genre témoigne d’une idée selon laquelle il existerait « un savoir inné qui serait brimé, qui serait offensé par la culture » (Melman et Lebrun), elle apparait comme un marqueur : celui du rejet de la culture et d’un retour paradoxal à la nature – une nature plus proche de la bestialité que de l’humanité ; ce qu’exprime le fait même de s’en prendre au plus vulnérable : l’enfant.
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